mercredi 10 mai 2006

Bombardement d'images


Du 1er au 19 mai, l'émission Indicatif Présent, à la première chaîne de Radio-Canada, propose un regard sur les photos qui porte le nom “Image en tête”. Il s'agit de faire la description de l'image qui nous a le plus marqué ces dernières 25 années. De plus, on interroge sur les ondes des gens connus dans divers domaines, des personnalités de tout bords, tout côtés. Cela fait quelque fois que j'écoute plus ou moins distraitement.
La description de l'image qu'a choisi Michel Marc Bouchard ce matin aura été l'une des plus percutantes jusqu'à présent, parmi celles que j'ai pu écouté. Pourtant, cela a généré en moins des réactions mitigées. Cette exercice, avec cette description-là atteint ici une espèce de sommet, de terminus où toute nouvelle description d'image devient banal.
Cette banalisation de l'image est justement générée par le trop-plein d'images. Nous sommes bombardés d'images quotidiennement. L'énoncé même est banal. Les journaux télévisés nous passent en flèche, sans émotion, des gens déchiquetés par un attentat-suicide, le gagnant à la Formule 1, la déclaration soporifique du ministre, etc. Jour après jour. Cela fait que la nouvelle pourrait être que le ministre fait une déclaration soporifique au volant de son bolide de Formule 1 en s'arrêtant devant les dégâts d'un attentat-suicide qui nous n'en serions pas plus surpris. J'en viens à me demander ce qui compte après tout dans cet exercice: trouver l'image la plus unique possible ou trouver la plus commune, de sentir que l'on n'est pas plus bête que le voisin ou plus original?
Je n'ai rien à dire sur le choix des images de tout un chacun, car dans la plupart des cas je peux les faire miennes. C'est toujours le sens de l'exercice qui m'intrigue. Est-il parti d'une bonne intention ou sert-il de stratégie marketing pour maintenir les cotes d'écoute? Désolé mais c'est le choc que j'ai eu ce matin après avoir écouté la description géniale de Michel-Marc Bouchard qui a réussi à me tirer une larme.
Du reste, je retiens deux choses de la description de “son” image: quoique que nous fassions, quoique nous disions, la nature reprend toujours ses droits et nous ne sommes même pas capable de voir cette dynamique-là qui se passe elle aussi jour après jour, en temps de guerre ou de paix. La nature nous indique bien l'importance de la symbiose pour fonctionner collectivement, car ce beau paysage décrit là existe parce qu'il y a équilibre des forces, ce qui n'est guère le cas dans le monde des humains puisque nous avons pris l'habitude de nous dominer les uns les autres et toutes les espèces vivantes par extension. Comme le disait un graffito sur le mur de pierre de l'Hôtel-Dieu de Montréal il y a une dizaine d'années: "La nature se vengera".
La question peut paraître mauvaise, inutile, voire incongrue, mais elle me préoccupe depuis quelque temps: À quoi cela sert-il en définitive d'être soumis à tant de nouvelles et à tant d'images? Cela change-t-il quoi que ce soit. Ce n'est pas un questionnement simple et égoïste du genre “J'veux rien savoir”. Il s'agit vraiment de se demander si la banalisation de cet accès au direct de la chambre à coucher du monde entier n'empêche pas l'action. Je veux bien penser globalement et agir localement mais nous assistons en ce moment à une forme d'acculturation universelle, une normalisation mur à mur par cet accès à tout. Les gens finiront-ils par s'habiller de la même façon de Tombouctou à Vladivostok, à écouter les mêmes musiques, à manger les mêmes plats, etc. Avons-nous la capacité à retenir un lien avec notre propre culture locale quelle qu'elle soit (à l'heure où l'on signe d'urgence la Convention sur la diversité culturelle) ou sommes-nous en train d'uniformiser? Ultimement, cela servira-t-il à nous rapprocher ou à nous éloigner?

À lire Le rôle des médias dans la promotion de la diversité culturelle: nouvelles opportunités pour le contenu local

1 Comments:

Anonymous Anonyme said...

J'ai pas mal voyagé ces dernières années et j'ai constaté avec beaucoup de tristesse que les gens perdent peu à peu ce qui fait leur richesse culturelle au profit d'un même moule : celui venant des USA...
Que tu ailles au fin fond de l'Afrique , en Europe ou en Asie tu retouves partout le clown bouffeur de hamburger , les godasses et les casquettes N... C'est bien triste tout ça ! Je comprends que tu ailles vivre dans la forêt...
Tinou

14:43  

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