samedi 6 mai 2006

Arte povera: road movie


J'ai le luxe d'avoir deux chez-moi. C'est un luxe somme toute bien modeste, d'autant plus que je fais la navette entre les deux à vélo par tous les temps: environ 7 km. Il s'agit là d'une "stratégie" élégante pour me garder la tête au-dessus des eaux. Je ne serais pas complètement malheureux à n'avoir qu'un endroit où vivre mais dans les deux cas, il y a des avantages et des inconvénients. Alors je suis opportuniste: quand les inconvénients prennent le dessus à un endroit, je m'en vais à l'autre! Je dois tenir ça de mon enfance. Nous avions une maison et un chalet.
Ma petite chambre minable de 13 m² me sert de bureau principalement. Jusqu'à présent je n'y ai pas dormi et n'y tiens pas plus que cela. Étant arrivé il y a à peine 5 jours, je ne peux pas dire que j'aie établi une routine de navette entre les deux, mais cela s'enligne vers ce que j'avais gambergé avant de venir m'installer ici. Je peux passer une bonne partie de la journée ici, à mon désormais bureau, et le reste du temps à ma cabane, avec mes chats. Le bureau commence à ressembler à ce que je voudrais qu'il soit en définitive, un endroit de travail personnel. J'ai maintenant un petit frigo de bar, tout petit mais où je peux ranger un minimum de denrées périssables, grâce à René chez qui je suis allé peindre hier et qui avait offert de me le prêter. Il a eu la gentillesse de venir me le porter hier en même temps que ma propre carcasse.
J'ai mis un sac de plastique blanc pour enfermer la blafarde lumière de plafond, un petit fluorescent en boucle qui donne 550 lumens. Ce faisant l'éclat est moins fort et directionnel. J'ai aussi une lampe à bras à laquelle j'ai décidé aussi de mettre un fluorescent en boucle, histoire d'économiser l'énergie et d'avoir assez d'électricité pour faire fonctionner le frigo et l'ordi, car il n'y a qu'une seule fiche électrique au mur. Fiche que j'ai d'ailleurs chengé aujourd'hui, l'autre datant sans doute d'une bonne 40taine d'années et usée "à la corde". Là je suis sûr que les prises ne tomberont pas tout bonnement. Les prises américaines, cette norme-là est insensé. Jamais ces fiches de mur n'auraient dû être acceptées. C'est l'une des normes les plus abberrantes en électricité sur ce continent.
La chambre est de cette couleur verte uniforme - murs et plafond - que l'on retrouvait dans les hôpitaux autrefois, peut-être y est-elle encore du reste, mais je n'ai pas mis les pieds dans un hosto depuis 20 ans. Pourquoi? Parce que C difficile. Hahaha!
Je suis dans la chambre du coin que j'appelle ironiquement la "suite présidentielle" car elle a deux fenêtres, une sacrée aubaine, d'autant plus que l'un d'elles est condamnée! D'ailleurs, lorsqu'on regarde de l'extérieur, cette condamnation est d'un inesthétisme désarmant: on a mis un simple panneau de bois à l'intérieur, visible de l'extérieur. Je vais tenter de cuisiner le patron pour la remettre en fonction... L'idée d'avoir un autre chez moi tient aussi à cela: je ne suis pas condamné (comme la fenêtre) à ne voir que cela pour les prochains mois. Je peux à tout coup durant la journée faire un bras d'honneur et m'en aller au galop sur ma bécane dans mon repaire boisé.
En fait, tout à l'heure m'est venu en image un film de Jim Jarmush, "Stanger than paradise" où si mes souvenirs sont bons, la première scène se passe dans une minable chambre d'hôtel newyorkais au début des années 80. Alors de me retrouver encore une fois dans une situation semblable - car j'ai déjà vécu cela à Vancouver en 1981 - me plaît un peu. Je vis cette espèce de road movie. C'est magique, car il y a des films parfois dans lesquels on aimerait bien être le personnage pricipal. Alors au lieu de voir ma situation comme "épouvantable", je me plais à l'observer aussi comme une espèce de road movie. Pour le moment le scénario ne s'écrit qu'au fur et à mesure. Je ne connais rien de la suite de mon monde. Ben, un peu comme tout le monde, quoi.
Je suis presque fier de maîtriser l'art de la pauvreté (arte povera) avec une certaine dextérité.

1 Comments:

Anonymous Anonyme said...

La description que tu fais de ta chambre me fait penser aux chambres que l'on voit dans certains tableaux d'Edward Hopper : impersonnelle, froide...Il va falloir que tu y mettes ta petite touche personnelle pour que cela devienne supportable; c'est petit mais cela peut devenir un lieu agréable à vivre. J'espère que tu vas nous parler de ta maison dans les bois et de tes chats !
Moi je partage ma vie avec deux chats, Popy et Théo.
Le premier vient de la SPA et j'ai trouvé le second un jour dans mon jardin, alors qu'il était tout petit. Sans doute avait-il été abandonné...il m'a suivi et n'est jamais reparti.
Quant à ta façon de vivre maintenant, même s'il elle semble précaire, elle n'en reste pas moins "un luxe" dans la mesure où c'est toi-même qui as choisi ce mode de vie. Beaucoup de gens hélas ne font que subir et se plaindre de leur destin. Je pense que tu vas y trouver une plénitude.
Tinou

16:05  

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